Garnat sur Engièvre
( Allier )
Notre Village et au-delà
Souvenirs (1) Souvenirs persos, le Patois, les Bornes
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En 1936, à la prise de succession du Clos du May, propriété familiale depuis 1898, la mère de mon épouse et son frère ont invité mes parents, peu après leur mariage (1935), à venir passer un week-end à la campagne, ceux-ci faisant remarquer à mon père que le plafond de la cave était bien bas, mon père lui proposa d’abaisser le sol. Prenant quelques outils, ils se mirent au travail, devinez , un bruit de verre brisé se fit entendre. Avec mille précautions, ils regardèrent la cause. Sous une épaisseur de terre et de sable se trouvaient de nombreuses bouteilles de vin et d’alcool, que l’ancien propriétaire avait caché là de peur du passage des Prussiens à cette époque ( guerre de 1870).
Cet ancien propriétaire était décédé sans révéler son secret. Nous avons pu boire la dernière bouteille de verre soufflé d’un vieux cognac datant de 1812, au mariage de ma cousine Marie-Bernadette Carnat avec Jean-Pierre Rochefort en septembre 1972. Après en avoir détruit son cachet de cire , le bouchon tomba en poussière dans la bouteille. Après l’avoir fait reposer, nous le filtrâme dans un filtre en papier, j’ai eu l’occasion alors d’y gouter, c’était un alcool au gout inoubliable
« Loire », ce nom du fleuve qui longe notre commune et fait frontière Est avec notre département. Ce nom fut donné à des régiments militaire en 1870. En effet un chef de guerre, commandant les terribles « chemises rouges » Garibaldiennes, propose son aide à la France, celle-ci est bien embarrassée ( n’oublions pas que nous sommes avant la loi de 1905), le fixa au sud loin de Paris, entre Autun, Dijon jusqu’à la Suisse, les Garibaldiens furent assimilés et intégrés au commandement des Régiments de la Loire. Si vous passez à la « Pierre de Couard (couhard) » à Autun ( ce nom proviendrait-il du nom vulgaire de la corneille dite couar ? (1)), sur son belvédère s’installera le haut commandement militaire Garibaldien ( réf : plaque commémorative sur place). Lors d’une confrontation, ce régiment de « Chemises Rouges » arrête l’avancée des Prussiens, et en plus, enlève un drapeau du 61ème régiment poméranien, le 23 janvier 1871, celui-ci fut déposé, à l’époque ‘ à la Mairie de Dijon. Haut fait d’armes et la seule victoire militaire de cette guerre.Grâce à ces faits, notre population locale, qui craignait l’arrivée de ces Prussiens, fut épargnée. ( de ce fait , à Dijon, il y a la porte dite du drapeau ).
Deux enfants de Beaulon étant revenus de la guerre, au titre de remerciements, deux familles ,firent ériger deux monuments de pierres, je crois, la croix dite « du rond -point du cimetière » et l’autre à la Curesse, parait-il indiqué sur les titres de propriété comme » inamovible », représentant, sur un important socle de pierre, un curieux personnage, « appelé St Joseph ? », qui regarde et domine la commune de Beaulon.
(1) Réf : dictionnaire des Symboles ( bouquins) chez Robert Laffont/ Jupiter
Je trouve la corneille en Irlande, l’un des noms de la Déesse de la guerre( Bodb), on retrouve le nom en Gaule dans le Théonyme « Cathubodua » ( corneille de combat).
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Durant la guerre de 39-45, en l’absence, au Clos du May, du père de mon épouse, Constant Detré, ma cousine, qui y habitait aussi recevait quelques copines du village. Celles-ci montaient au grenier ou étaient entreposés des cartons à dessins.
Malgré l’interdiction d’y toucher, celles –ci les ont ouvert ( cartons contenant des pastels de nus féminins) vous pensez bien que ces jeunes filles ne manquèrent pas de le dire autour d’elles. Ce qui fit dire que mon beau-père était un pervers. ( ce fait m’a été raconté par la fille d’une des coupables.) Depuis ce n’est plus un pervers mais un artiste.
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Lorsque je venais à bicyclette depuis Moulins, dans les années 1957-60, certains jeudis ( autrefois jour de congé des écoliers, maintenant le mercredi)., à la pèche, dans l’étang des Calbats, J’ai assisté à un phénomène intéressant, peu avant la tombée de la nuit, j’ai vu dans le ciel arriver de trois horizons différents, trois nuages importants d’hirondelles, celles-ci se sont posées sur les roseaux, qui pliaient sous le poids, le ramage de celles-ci était assourdissant, puis d’un seul coup, silence total. Où sont-elles maintenant ? rentrant à bicyclette sur Moulins vers la nuit, un fort vent se mit à souffler face à moi, que même dans la grande montée après Lusigny, debout sur les pédales de mon vélo aux roues de 700, avançant péniblement avec tout mon matériel de pêche, je suis arrivé après 22h chez mes parents, inquiets, ma mère m’attendait au portail et avant d’avoir pu justifier mon retard, je reçu une bonne paire de claques non méritée mais justifiée par son inquiétude.
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Après la naissance de notre fils, nous avions loué pour l'été 1975 La Tuilerie, maison à pans de bois au coin effondré, une grande pièce qui fera office de cuisine et salle de séjour au pilier central et tout à côté une réserve qui servira de chambrette, nos voisins cultivateurs, où nous trouvions de bons fromages de chèvres ( 3 ou 4 chèvres grandes comme des petits ânes, au poils très longs, de couleur très foncée.) Ce cultivateur avait un beau-père de près de 90 ans, bien sympa, dit " le Père Canet" au titre de voisin, vint nous faire la causette un soir d'été, c'est lui qui disait, avec un certain humour, qu'il avait appris au Lieutenant De Gaulle à monter à cheval en 1914. .
Comme nous étions assis sur une pierre longue faisant office de banc contre la maison, je lui ais demandé si il parlait le patois, il me répond " les anciens, oui ! " et rien de plus. Quelques jours plus tard, je le retrouve avec un copain parlant tous les deux un curieux langage, ils "patoisaient". Surpris, je n'ai rien dit. Un peu plus tard nous rencontrant, je lui demandai pourquoi m'avoir fait cette réponse : " écoutez me dit-il, on parle entre nous, en patois, mais si un jeune nous entend parler comme ça, il pourrait se moquer de nous....et j'aurais honte ! j'ai compris ( Mais quel dommage!!).(Heureusement la sté d’Emulation du Bourbonnais, , pour éviter de perdre complètement ce patrimoine. , a publié un livre « Patois de la Sologne Bourbonnaise » en 2012, voir aussi le document de Mr Prunier. ( 07 février 1996), ainsi que plus récemment ( 2019) une BD en patois « La Guérison miraculeuse » par Robert Thaveau et Alain Muller, publiée par l’association CSB (Chevagnes en sologne bourbonnaise ) au profit de l’ APRSB ( Amis du Patrimoine Rural de Sologne Bourbonnaise ).
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Un Garnatois (dont j’ai oublié le nom, qu’il veuille bien m’en excuser ) m'a raconté aussi l'histoire suivante : " écoutez, je vais vous raconter ce qui est arrivé à mon grand-père, tout petit, ( courant XIXème siècle) Lorqu'une équipe du cadastre, est venue au village placer les bornes cadastrales sur les terrains, ils ont fait appel à celui-ci, après accord de ses parents : celui-ci , bien content, espérant quelques piècettes. Cet agent lui promettant une rémunération dont il se souviendrait longtemps, à conditions de lui promettre de bien se souvenir où les bornes étaient placées. Le travail terminé, ce géomètre lui fit réciter où étaient placées les bornes. Très bien , lui dit-il, viens plus près de moi afin que je te donne ton salaire, tout heureux, il s'approche...et vlan! il reçoit une monstre gifle. Celui-ci me dit: "mon grand-père , durant toute sa vie, s'est souvenu où étaient placées les bornes". ( cela me fut confirmé aussi par un ancien retraité du Cadastre ).